Une discussion, des performances, des projections, des visites et des lectures sont organisés le 18 et 19 novembre 2023 pour interroger collectivement les pratiques de soin et d’analyse des institutions. Ces événements s’inscrivent dans le cadre du grand désenvoûtement, un processus initié en 2022 qui examine le Palais de Tokyo à travers son histoire, ses fonctionnements et ses aspects tant symboliques que politiques.
Après une exposition et des conférences, cette analyse de l’institution se prolonge en 2023 sous la forme de moments internes au Palais de Tokyo, comme autant de chapitres non communiqués, passés et en cours, parfois agissants et encore incomplets. Le nouveau chapitre public du grand désenvoûtement est quant à lui une proposition d’échange avec des artistes, des acteur·rices de la psychiatrie, de la culture et de la pédagogie. Il est une tentative pour approcher ou approfondir des notions propres à la psychiatrie, et liées à la pédagogie, qui pourraient inspirer l’analyse du Palais de Tokyo, et plus largement des institutions culturelles.
Qu’est-ce que la psychothérapie institutionnelle et peut-on légitimement la convoquer dans les lieux culturels ? Est-ce que les différentes formes d’analyses institutionnelles peuvent être des outils pour repenser, voire pour transformer, ce que nous instituons ensemble ?
La discussion avec Josep Rafanell i Orra, psychologue et écrivain, Laurence Rassel, curatrice, travailleuse culturelle et directrice de l’ERG, Valentin Schaepelynck, philosophe et historien des idées, et avec Adélaïde Blanc, curatrice au Palais de Tokyo, sera l’occasion de soulever un certain nombre de questions sur les possibles formes de soin apportées aux relations et aux manières de faire dans des structures et des contextes parfois aliénants. Rejoignez cette conversation le samedi 18 novembre à 15h.
Tout au long de ce week-end, retrouvez La famille du Bureau des pleurs, une performance de Carla Adra qui remet en circulation des récits d’injustice, des humeurs et des maux invisibles du Palais de Tokyo, ainsi que la performance d’Anaïs Touchot, Capital Romance, où il vous sera proposé de calculer votre (in)compatibilité amoureuse avec le centre d’art à partir de votre thème astral et de celui du Palais de Tokyo.
Rendez-vous le dimanche 19 novembre à partir de 16h30 pour écouter les mots de figures oubliées de la psychothérapie institutionnelle. Directrices d’hôpital, psychiatres et psychanalyses, les femmes convoquées lors de cette lecture à six voix ont pensé l’aliénation dans les établissements de soin, la temporalité dans les institutions psychiatriques ou encore les rôles des femmes soignantes dans l’humanisation des soins.
Les trois films projetés lors du week-end de Grand désenvoûtement ont en commun de présenter des pratiques bousculant les rapports de subordination aliénants dans des contextes de vie, de soin et de travail. Des images d’archive permettent de plonger dans le quotidien de Saint-Alban et de la Borde, deux établissements psychiatriques qui ont proposé de soigner l’institution pour mieux soigner les personnes. Datant de 2023, « Le balais libéré » analyse avec un regard contemporain le processus d’émancipation d’une entreprise de ménage dans les années 1970, et suggère ainsi des manières de soigner les relations dans d’autres domaines et métiers que ceux de la psychiatrie ou de la pédagogie.
Initialement conçue avec et pour les équipes du Palais de Tokyo, la visite guidée menée Nicolas Heimendinger, docteur en histoire de l’art, et Joanna Wong, médiatrice, permet de (re)découvrir divers épisodes de l’histoire du Palais de Tokyo. Imaginée dans le cadre du « Temps faible, Le grand désenvoûtement, chapitre 23 », le parcours proposé éclaire ce dont on hérite en tant que public du centre d’art, artiste invité·e dans la programmation ou encore salarié·e : soft power dans les années 1930, réception du projet architecturel, usage du bâtiment pendant l’occupation, déménagement des collections au Centre Pompidou et politiques culturelles diverses sont autant d’éléments qui façonné nos rapports à ce lieu, à l’art contemporain et à ce que nous y institutions.
Convoquée dans la programmation passée et à venir du centre d’art, la psychothérapie institutionnelle est un ensemble de pratiques mises en œuvre dans quelques établissements psychiatriques en France à partir des années 1940. Elle entend désaliéner les institutions psychiatriques en repensant les relations entre soigné·es et soignant·es, et en permettant aux familles, aux malades et au personnel de s’émanciper d’un état de « passivité obéissante » par la subversion des automatismes propres à chaque établissement.
Aujourd’hui critiquées ou réifiées à travers quelques figures historiques, fantasmées ou expérimentées dans le champ de la culture, la psychothérapie institutionnelle, et par extension la pédagogie et l’analyse institutionnelles, sont le point de départ du nouveau chapitre du grand désenvoûtement. De quel contexte sont-ils issus et comment évoluent-ils aujourd’hui ? Que nous dit la psychothérapie institutionnelle du collectif, des formes de pédagogies alternatives ou encore des mécaniques aliénantes à l’œuvre dans les lieux d’art ? Peut-on s’en inspirer légitimement dans des établissements culturels, et peut-elle être un outil d’évolution, voire de transformation, des institutions artistiques ou d’autres domaines ? Les interventions d’artistes, les temps d’échange et le programme de projections des 18 et 19 novembre tenteront d’examiner ces enjeux et ce que nous instituons ensemble en tant que visiteur·euses, artistes et salarié·es.
Cet événement est accessible sur présentation d’un billet d’exposition.
Artistes : Carla Adra, Anaïs Touchot
Intervenant·es :
Josep Rafannel i Orra, Laurence Rassel, Valentin Schaepelynck, Adélaïde Blanc, Nicolas Heimendinger, Agathe Boulanger, Sybille Chevreuse, Carine Lendrin, Lena Monnier, Graziela Susin, Camille Zuber