Avec : Mariana Benenge, The Bells Angels, Baptiste César, Chéri, Damso, Emilie Désir, Fabien Jobard, Kapela Marna, Hito Steyerl, Melchior Tersen, Simon Johannin, Kleospatera, Noé Nadaud
& les étudiant·e·s de la 5e promotion de la Casa 93 : Mavis Ahmès , Charlotte Charton, Léo Ciavarella, Khal Fergoug, Lou-Hân Gaillard, Cyrielle Gallais, Iris Imbert, Freddy Lassey, Cristale Maillot, Isis Mbango, Zoé Nguyen, César Noyer, Francine-Audrey Nkou, Tali Ricard, Hyphialtes
Dans le prolongement de l’exposition « Jusqu’ici Tout va bien » réalisée en 2020 avec l’école Kourtrajmé (Clichy-sous-Bois / Montfermeil), le Palais de Tokyo invite les étudiant·e·s de l’école Casa 93 (Montreuil), pour élaborer une exposition capsule, sous forme de workshop, du 15 décembre 2022 au 8 janvier 2023. À cette occasion les créations de ces artistes émergent·e·s sont mises en relation avec celles d’autres artistes, de chercheurs, de danseur·euse·s, de musicien·ne·s.
Quelques lettres séparent la foule de la foudre. Lorsqu’elle n’est pas envisagée comme un châtiment, une passion subite, la foudre vient simplement de là où les nuages flânent. Elle s’éclaire au rythme électrique du tonnerre. Vue du ciel, la foule est une masse anonyme, menaçante et vertigineuse. Vue du sol, elle est composée d’une multitude d’individus et d’autant de sentiments qui se déchargent.
Dans Masse et puissance (1960), l’écrivain Elias Canetti affirme que c’est la « décharge » qui constitue réellement la masse. Avant elle, la masse n’existe pas vraiment. « C’est l’instant où tous ceux qui en font partie se défont de leurs différences et se sentent égaux », soudaine communauté dans un monde fondé sur les distances et les frontières. « Dans la décharge, ils rejettent ce qui les sépare. » En action, la foule est pyrotechnique. En vision thermique, elle s’échauffe : la foule voit rouge, mirage de l’enfer ou des délices. Alors que la société est autant contrôlée que dispersée, l’exposition Foudre sentimentale explore un actuel fantasme libidinal de la foule, de ses sentiments fumigènes, de ses corps-à-corps lacrymogènes. L’exposition propose une confrontation des corps du public avec ceux d’une quarantaine de mannequins devenus support de création pour les élèves de l’école de mode Casa 93. Suivant la dynamique du vortex, ces corps multiples et inanimés, disposés en spirale, permettent au public de prendre position : être dans la foule ou face à elle. Les créations textiles élaborées par les étudiant·e·s s’intéressent ici à la question de l’uniforme qui peut faire communauté (une communauté parfois anonyme), ainsi qu’aux fantasmes reliés à certains accessoires, certaines dégaines, qui motivent les contrôles au faciès. Ces créations sont mises en relation avec des peintures, des photographies, des films, des archives, des poèmes, des sessions de musique et de danse.
La manifestation politique devient danse, des chorégraphies deviennent manifestations. Foule romantique, inclusive, nostalgique, numérique, chaotique, timide, muette, extatique, fluorescente, opaque… À l’échelle du corps (social) les sentiments se cristallisent. Quand la fougue et le karma se déchainent, la foule n’existe plus uniquement comme entité : la joie est à la fois collective et individuelle. Avec soif d’idéal.