« Pourquoi nos corps devraient-ils s’arrêter à la frontière de la peau ? »
Anticorps s’offre comme une exposition qui tente de penser à travers les peaux, en s’attachant à développer plusieurs registres de l’affectivité, de la présence et de l’haptique, cette exploration du sens du toucher sans que celui-ci soit physiquement activé. La « mise à distance » pousse à une volonté renouvelée de contact.
Les artistes réuni·e·s au sein d’Anticorps font état de caresses, de murmures, de souffles et de menaces qui questionnent nos réactions et transactions émotionnelles, nos rapports sociaux. Si l’exposition ne fait pas de la crise sanitaire actuelle un sujet, les oeuvres, ainsi que les relations tissées entre elles, permettent de questionner la distance et le toucher, considérant ces deux termes comme intrinsèquement politiques et poétiques.
La polysémie du titre de l’exposition est dès lors manifeste : il s’agit à la fois d’accepter les nouvelles normes imposées de l’être-ensemble (distance) tout en ouvrant la perspective d’un autre érotisme social (toucher). Il parait nécessaire, comme le préconisait Susan Sontag, de remplacer les métaphores militaires souvent attachées au fonctionnement de nos systèmes immunitaires par un autre lexique, et de nous préoccuper davantage d’hospitalité. Anticorps invite à parcourir le Palais de Tokyo à la fois comme un foyer (in vitro) et comme un réseau mouvant (in vivo). Cela permet de réfléchir autrement aux communautés éphémères que le Palais de Tokyo peut créer et rassembler, et tout particulièrement aux relations suggérées entre les publics et les oeuvres.
« La maladie est vue comme une invasion d’organismes étrangers, à laquelle le corps réagit par ses propres opérations militaires, telle la mobilisation des « défenses » immunologiques, et la médecine se fait « agressive » […] Les métaphores militaires contribuent à stigmatiser certaines maladies, et par conséquent celles et ceux qui en sont atteints. »
Artistes : A.K. Burns, Xinyi Cheng, Kate Cooper, Pauline Curnier Jardin, Kevin Desbouis, Forensic Architecture, Lola Gonzàlez, Emily Jones, Florence Jung, Özgür Kar, Len Lye, Nile Koetting, Tarek Lakhrissi, Carolyn Lazard, Tala Madani, Josèfa Ntjam, Dominique Petitgand, Ghita Skali, Koki Tanaka, Achraf Touloub
Commissaires d’exposition : Daria de Beauvais, Adélaïde Blanc, Cédric Fauq, Yoann Gourmel, Vittoria Matarrese, François Piron, Hugo Vitrani