Audi talents a pour ambition d’accompagner les artistes émergents dans la réalisation de leurs projets. Les œuvres des artistes Marielle Chabal, Grégory Chatonsky et Léonard Martin, présentées pour la première fois dans le cadre de cette exposition, ont été réalisées grâce au soutien du programme.
Jeu de mot sur les faits dits « alternatifs » qui ont envahi les médias et la communication de notre époque, l’exposition alt+R, Alternative Réalité nous rappelle que l’imaginaire demeure le pouvoir des artistes, non pas pour falsifier le réel mais bien pour en proposer des lectures plurielles, au service de notre émancipation et du rafraîchissement de nos horizons.
Lauréates du programme Audi talents, les trois installations présentées au Palais de Tokyo sont des voyages prospectifs dans l’Histoire et les histoires qui façonnent notre époque, celles des nouvelles technologies, des discours sur l’art et d’un avenir affamé de science et de fiction politique.
Dans « Al Qamar », Marielle Chabal nous entraîne dans l’environnement d’une communauté libertaire à l’origine de la fondation, en 2024, de la « Cité de la Lune » (Al Qamar) aux alentours de Jéricho en Palestine. L’installation nous plonge au coeur de cette fiction à laquelle l’artiste travaille depuis plusieurs années, produisant des textes et des objets qui dessinent le contour de cette société nouvelle. Montré ici en avant-première, le projet prend corps dans la réalisation d’un film qui cherche à dénouer les clivages coloniaux mis en place par l’installation même de la communauté d’Al Qamar, dans un territoire de conflits (en l’occurrence, le territoire Palestinien). L’installation présente en regard des maquettes de bâtiments de la cité, des costumes et autres documents et accessoires ayant servi à la réalisation du court-métrage produit avec le soutien de Audi talents.
Avec « Terre seconde », Grégory Chatonsky nous projette dans le futur immédiat des fantasmes d’une intelligence artificielle nourrie de « deep learning », produisant des images et des objets inédits issus des calculs statistiques de la machine. Puisant dans le répertoire infini de formes accumulées sur internet, ce réseau récursif de neurones invente en permanence des images qui semblent provenir d’un inconscient collectif. L’ensemble de l’installation nous propose de traverser différentes expériences et expérimentations qui forment le premier état de cette
« Terre seconde » peuplée de chimères numériques.
L’exposition se conclut sur la proposition Picrochole – Le rêve de Paul de Léonard Martin, où l’artiste dresse un portrait fantasmatique de Paolo Uccello, célèbre peintre italien du quattrocento obsédé par la géométrie et dont la « Bataille de San Romano » (1455) a marqué l’histoire de l’art. L’installation dévoile tout d’abord trois grandes marionnettes, des chevaliers comme échappés des peintures du maître, des carcasses poétiques composées de centaines de morceaux de polycarbonate ajustés les uns aux autres et couvertes de signes graphiques. Au centre de l’installation, Léonard Martin présente une « arène » où ces chevaliers reproduits en modèle réduit s’affrontent symboliquement dans une chorégraphie chaotique, tandis que le fond de l’installation propose une vidéo déployée sur trois écrans où ces marionnettes sont mises en scène dans un véritable voyage filmique : pensé comme un assemblage de sonorités liées à ces corps de combattants et aux matériaux qui les protègent, le film est écrit comme un songe où l’artiste a voulu intriquer ces objets-chevaliers dans la substance même du paysage.