La montée en visibilité des pratiques autochtones dans l’art contemporain international est un phénomène majeur de l’histoire de l’art en train de s’écrire, avec le risque, parfois, de devenir une simple étiquette. Les termes « hybridité » et « anthropophagie » (en référence au « Manifeste Anthropophage » d’Oswald de Andrade) ont ainsi été accolés à « autochtonie » afin d’éviter les assignations identitaires et d’interroger l’invention de pratiques et d’identités variables, déjouant les catégories héritées du colonialisme et permettant de repenser les rapports à la nature, au territoire, aux humains et aux autres qu’humains. En laissant la parole à des chercheurs et des artistes, ce séminaire entend déplacer la focale des questions institutionnelles vers celles des processus créatifs, des identités assignées vers les pratiques par lesquelles l’individu s’auto-désigne et invente ses relations au monde.
Pour cette première séance en lien avec Réclamer la Terre, Léuli Eshrāghi, artiste, commissaire et conseiller·e scientifique de l’exposition, procède à l’étude des conditions de diffusion des arts visuels autochtones. Se penchant non seulement sur les courants de pensée poétiquement décoloniaux du Vanuatu et d’autres territoires autochtones francophones, mais également sur les modes de conception des mondes de l’art par les artistes, penseur·es et commissaires, iel participe au renouvellement linguistique et aux futurismes autochtones. Cette intervention est en présentiel en langue française.
À sa suite, la commissaire et écrivaine Anishinabe-kwe, Wanda Nanibush, présente un ensemble d’artistes qui placent la résurgence culturelle, la justice réparatrice et la récupération des terres au premier plan du mouvement environnemental. Ils et elles s’attaquent aux problèmes de notre époque, faisant acte de méthodologies et de philosophies autochtones modifiant nos relations matérielles et spatiales au monde. Wanda Nanibush affirme que la justice et la souveraineté sont aujourd’hui des facteurs essentiels à tout mouvement environnemental qui ne souhaite pas reproduire les relations coloniales existantes. Cette intervention est en présentiel en langue anglaise.
Co-conception Morgan Labar (enseignant associé, département ARTS, ENS) et Daria de Beauvais (Senior Curator, Palais de Tokyo). En partenariat avec l’École Normale Supérieure (Paris).