Pour célébrer 15 ans de soutien à la création artistique émergente française, Audi talents a proposé à onze de ses lauréats de partager leur propre vision de ce que sera la ville dans 150 ans. Sous formes de vidéos, d’images, de sons et avec leur propre vocabulaire, onze artistes nous livrent leurs intuitions sur le monde de demain, autant de regards singuliers tournés vers l’avenir.
Un projet curaté par Gaël Charbau, directeur artistique Audi talents et commissaire d’exposition :
« Les statistiques prédisent qu’à la fin du 21e siècle, 70% de la population mondiale vivra en ville… Mais cette ville sera-t-elle « sensuelle », écologique et construite pour mieux vivre ensemble comme l’espère l’architecte Jacques Ferrier, ou au contraire appauvrie, chaotique et générique comme l’analyse aujourd’hui Rem Koolhaas ? »
Découvrez ci-après les œuvres des 11 lauréats Audi talents :
« Dans 150 ans la ville sera un fragment, un souvenir de quand le réel et le virtuel étaient encore deux entités différentes. Un endroit que l’on habitait, où l’on se déplaçait pour se balader, pour faire ses courses, voir des gens. Maintenant tout ça n’est qu’un lointain souvenir raconté par les anciens, nous n’avons plus besoin de ville réelle. La ville que l’on habite c’est celle d’un monde irréel, où l’on ne s’embête plus avec les lois de la physique. La metacity. Une rumeur dit que certains vivent encore ensemble dans les montagnes, sans puce et loin des drains qui nous nourrissent. A ce qu’il parait il mange des aliments qui viennent du sol, et que chaque aliment à un goût différents ! »
L’artiste Charlie Aubry dévoile un clip 3D dans lequel la photogrammétrie nous ballade dans un univers où les échelles et les hiérarchies entre intérieur et extérieur sont abolies. Une ville augmentée par une bande sonore où chaque note reproduite par un synthétiseur modulaire correspond à ses propres architectures.
Data Center City s’inscrit dans une tradition de représentation dystopique de la ville de demain.
Camille Menard nous propose ici une interprétation contemporaine de No-Stop City d’Archizoom Associati (1969) ou encore de la métropole Mercerie, d’Andrea Branzi (2010).
Une ville où les dérives de nos sociétés se transposent en architectures et sont reproduites à l’infini pour ne constituer qu’un seul et vaste territoire. Dans cette image l’artiste s’intéresse à nos choix « techno-sociétaux », à la dématérialisation trompeuse de nos technologies et la croissance de la surveillance algorithmique.
L’animation présentée par Romain Bodart est composée à partir de captations nocturnes de quartier de Paris. Celles-ci sont ensuite découpées puis animées avec des boîtes lumineuses ou des cartes perforées. Un résultat qui fabrique comme une synesthésie urbaine, où nos perceptions sont augmentées par des sensations peu communes, ici une audition colorée appelée aussi synopsie.
Teddy Sanches pose le contexte d’une utopie où les véhicules motorisés n’existeraient plus sur la surface de la terre, faisant place à de vastes zones urbaines non-utilisées. Un univers où les humains retrouverait la liberté d’usage de leur environnement proche, pour exemple, une série de carnaval à durée indéterminée proposés par la « princesse de la ville ».
Dans cette vidéo rappelant les codes de la virtualité, le personnage et avatar Skeo, interroge son « bartphone » pour choisir la tenue qu’il portera lors de ces nombreuses festivités.
« ***Quelques minutes plus tôt… Son provenant du bartphone de Skéo***
— Flash info ! Nous sommes le 1 janvier 2172, un discours spécial de la Princesse de la Ville se tient en ce moment même Place de l’Hôtel de la Ville, nos équipes sur place vont vous montrer les imagesTh en direct !
— C’est O-FFI-CIEL, nous assistons à la fin des véhicules motorisés en surface de la Ville !
Là, on est en train de voir s’kon va faire des routes… on a pensé à des jardins créoles, du mobilier urbain récupérateur d’énergie solaire…
Avant de décider du plan de réaménagement, des carnavals vont avoir lieu dans différentes parties de la Ville pour une durée indéterminée.
Le premier, c’est le 3 janvier et on fera tout le tour du périf’. Il partira de porte de Sevran.
Mes Villoises, mes Villois, on s’capte là-bas !!!! »
Teddy Sanches
Cette œuvre de Théodora Barat s’inscrit dans un long travail de recherche autour des infrastructures nucléaires. Dans une vue zoomée à l’extrême, l’artiste révèle un grain surdimensionné et omniprésent. Un contexte visuel dans le lequel les éléments urbains actuels et ordinaires sont transposés dans un imaginaire flou. Alors que les architectures sont à peine discernables, le grain, devenu protagoniste principal, incarne autant qu’il annonce la présence d’éléments radiants.
Avec le dessin, Isabelle Daëron suggère une ville où les relations entre les composants de l’espace urbain seraient optimisées. Elle y convoque la réciprocité et l’externalité positive, c’est à dire l’échange équivalent et le service rendu à l’ensemble sans attente de récompense. Les éléments sont autant nos eaux usagées, un buisson, des moteurs, le soleil, des émissions de gaz ou encore nos habitations. Les liens, matérialisés par de nombreuses flèches colorées, dessinent le paysage d’un vaste travail à mener.
“viral-c-t” est une œuvre hybride mélangeant intelligence artificielle, 3D et réalité augmentée.
La vidéo et le filtre Viral-C-T présentés par Anne Horel, témoignent de multiples transformations cellulaires et technologiques imaginées par l’artiste. L’artiste présente une ville où cohabiteraient les « homo-digitalus » : une trans-espèce résultante d’une symbiose entre l’humain, l’animal, les virus, les plantes et l’urbain. Une projection futuriste où ces créatures trans-identitaires coloniseraient la biosphère et le web 6.0, via l’intelligence artificielle. Cet univers ambivalent, dans lequel le métavers et le monde physique se mélangent, fait apparaître une cité urbaine colorée, tentaculaire et mutante.
« L’exode de la population mondiale vers les villes est l’un des traits principaux de la modernité depuis le 19ème siècle. Dans le contexte actuel, et en particulier à la suite du confinement, l’espace urbain est apparu à beaucoup comme mortifère et pour tout dire invivable. Plutôt que de proposer des solutions à cette inhabilité des villes selon le régime utopique de la modernité, je propose ici de me plonger dans cet avenir probable de l’extinction de l’espèce humaine. La ville deviendrait alors un champ de ruines dont les éléments pourraient être utilisés par une intelligence artificielle essayant de se recomposer un corps et de se protéger du monde extérieur en vue de créer une intériorité. L’image et le texte ont été créé en collaboration avec une intelligence artificielle, de sorte que je ne sais pas quel a été mon apport et quel a été celui de la machine, me perdant en elle et la perdant en moi. »
Le plasticien et chercheur Grégory Chatonsky nous présente ici une œuvre co-réalisée avec une intelligence artificielle. L’imagination artificielle et les réseaux de neurones récursifs avec lesquels il a travaillé l’ont amené à cette synthèse d’un monde creusé de toute part où l’espèce humaine tente de survivre.
Léonard Martin imagine, dans 150 ans, une ville dans laquelle des artistes-bricoleurs inventeraient « un monde fait des restes du premier » et un nouveau langage affranchi du conformisme. Une forme de résistance à civilisation actuelle, qu’il décrit déjà bien engagée dans une proche catastrophe. L’image d’atelier qu’il nous présente pose le cadre de la circulation souterraine des idées, des désirs et illustre sa philosophie artistique « poursuivre une recherche en pure perte, sans but premier de montrer, autant à l’écoute qu’à l’écart ».
Le duo XP Unit pose le contexte d’un espace urbain imaginaire entre « utopie expérientielle et dystopie collective ». Cette ville, nommée « New Commons », serait régie par cinq institutions récréatives et permettrait aux humains de s’affranchir du travail et des contraintes, mis à part quelques décisions collectives concernant leur précieux data center. L’espèce humaine, évoluant d’un « blob d’habitation » à un autre, semblerait jouir d’une vie légère, ponctuée par quelques expériences communautaires chargées d’adrénaline.
« Pour Audi talents, nous imaginons la ville de demain entre utopie expérientielle et dystopie faite de répétitions monotones. À New Commons, les usagers prennent part au choix du prochain software de V-10™ , leur précieux data center, autant que de la prochaine séance de Strobe Trance au Solarium. Propulsés d’un Blob d’habitation à un autre, ils jouissent d’une vie légère, sans travail. Autour de 5 institutions récréatives, les habitants se shootent à l’adrénaline d’expériences communautaires. Et si c’était ça la ville de demain ? »
L’œuvre musicale de Thomas Karagiannis nous transporte dans une cité qu’il imagine claire et radieuse. Un environnement urbain où la matière, augmentée du progrès, deviendrait transparente, offrant aux regards quelques éléments architecturaux gigantesques mais où les éléments naturels seraient préservés. Un paysage presque idyllique où seul le doute d’un avenir incertain resterait présent dans l’esprit de l’espèce humaine.
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Commissaire : Gaël Charbau
Artistes : Charlie Aubry, Camille Menard, Romain Bodart, Teddy Sanches, Théodora Barat, Isabelle Daeron, Anne Horel, Gregory Chatonsky, Léonard Martin, Roman Weil, Tom Formont, Thomas Kargiannis