« Quand vous voyez une image à la télévision – par exemple une image de révolution -, après un certain temps, elle perd son sens, elle devient autre chose. En travaillant avec des enfants ou des marionnettes, un changement s’opère, la mémoire se rafraîchit et le drame disparaît. Le sujet lui-même devient l’élément central de l’oeuvre. C’est une façon de mieux comprendre l’histoire, les besoins humains, les choses qui ont changé le monde. »
Al Araba Al Madfuna [Araba l’enterrée] est le nom moderne donné au site égyptien qui abrite la ville antique d’Abydos où se trouve l’enceinte funéraire du pharaon Khâsekhemoui (vers -2740) ainsi que le principal temple dédié à Osiris. C’est à ce village que Wael Shawky se réfère dans trois films éponymes adaptés de fables tirées du livre de Mohamed Mustagab, Tales from Dayrut (1983). Les villageois du site lui ont expliqué avoir creusé des galeries souterraines dans l’espoir de découvrir des trésors archéologiques – ce que l’artiste comprend comme une survivance du passé dans l’imaginaire contemporain. En résonance à cette pratique, Wael Shawky construit une vaste installation immersive qui compose un espace narratif où l’histoire et la géographie sont indissociables. Trois films viennent ponctuer le parcours où les mythes sont sans cesse répétés et se métamorphosent en récits du changement. Les personnages sont joués par des enfants mais leur voix sont celles d’adultes. C’est là une manière d’affirmer le pouvoir de la fiction, mais aussi de tracer un lien entre les générations. Les contes ancestraux deviennent une matière malléable. En mettant à distance l’incarnation cinématographique, Wael Shawky emprunte les chemins de la parabole et donne alors au langage la puissance nécessaire pour accéder à un niveau suprasensible, au-delà des sens.
Wael Shawky est né en 1971 à Alexandrie (Egypte) où il vit encore aujourd’hui.