Il est impossible de porter à nouveau les costumes collectés par les musées, règle de conservation oblige. Qu’a cela ne tienne, Tilda Swinton présente à bout portant, mais jamais portés, les vêtements de toutes époques dans un défilé troublant.
Dans les réserves des musées de mode, les vêtements par milliers attendent. Sur des cintres, en rang serrés ou délicatement échoués dans les tiroirs de rangement, des siècles de garde-robes silencieuses patientent. Souvenirs en forme de ceux qui les ont porté, ils sont abandonnés des gestes du quotidien. Sous la mousseline ou le crêpe, sous le motif peint ou imprimé, le corps s’est dissout.

Il est impossible de porter à nouveau les costumes collectés par les musées. Les règles de conservation l’imposent. C’est une contrainte qui n’a pas pour seule vertu de préserver l’état des textiles tous fragiles. Elle met aussi à l’écart l’entreprise de déguisement qui est une tentation car les corps ont changé de décennie en décennie rendant obsolète et dérisoire le socle épidermique d’origine.

Pour manipuler le vêtement endormi, le conservateur et le restaurateur font oeuvre de préciosité. Leurs mains, gainées de gants de coton blanc effleurent le tissu. Avec mille précautions, ils se saisissent d’une manche ou d’une bretelle selon un vocabulaire souterrain et maniéré qui n’appartient qu’au monde secret des réserves. à l’abri de la lumière pourtant, certains dessins tracés sur la fibre continuent de disparaître lentement. Sans l’attention et la vigilance des gardiens de mode, les vêtements si convoités et malmenés disparaîtraient plus vite que l’engouement qui nous mène vers eux.

Tilda Swinton a appris ces gestes qui font d’un vêtement ordinaire une relique. Elle en a inventé d’autres, chastes ou romanesques. à bout portant, mais jamais portés, les vêtements de toutes époques qu’elle présente avec science de la retenue constituent un défilé troublant. Dans ses bras longs, les robes de clientes célèbres, belles endormies aux manches pétales soupirent à nouveau à la faveur d’un défilé des siècles passés et présent.
 

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Performance conçue par Olivier Saillard, directeur du musée Galliera, présentée au Palais de Tokyo dans le cadre du Festival d’Automne à Paris