À la fois exposition, installation vidéo, performance et débat public, TOUT ART CONTRE LA GUERRE donne la parole aux artistes ukrainien-e-s et veut témoigner de l’exil en Europe de nombre de ces artistes qui ont laissé leur travail en Ukraine et sont à la recherche de nouvelles conditions pour exercer leur art.
La soirée se décompose en une présentation des travaux de cinq jeunes artistes ukrainien-e-s en France et en Europe et d’un débat public animé par Victoire Le Bars avec la collaboration de Katia Bokatova Vincent, architecte et représentante d’Ukraine Amitié.
L’œuvre perfomative de Nikita Kravtsov, « Russian Red » est basée sur le travail anthropométrique d’Yves Klein. Mais la comparaison s’arrête là. Car si Nikita Kravtsov montre une certaine violence dans le projet d’Yves Klein, utilisant et exhibant le corps féminin comme un seul matériau pour dessiner, il ne laisse qu’une trace de corps féminin sur une toile, pour l’éternité de l’art.
« Rouge Russe» montre les traînées sanglantes que les soldats russes laissent en Ukraine. Nikita Kravtsov dénonce les viols et crimes de masse sur les femmes, les hommes et les enfants. Et ce n’est pas sur la toile que s’imprègne la couleur rouge de la Russie moderne mais comme une scarification du sol gelé, pour l’éternité de l’histoire d’un pays.
Des familles, des frères et sœurs se déchirent.
Deux pays, semblables par leur passé commun, brûlent.
Et meurent par la volonté d’un homme seul, au pouvoir autocrate.
Face au chaos, Aleksa Haluszczak souhaite éveiller les consciences et faire résonner, à travers ces images, l’écho de l’espoir.
Dans ses peintures, Viktoria Oreshko travaille principalement sur son identité culturelle et ce depuis plusieurs années où elle explore le concept du corps comme territoire politique. Elle a également observé en regard de photographies provenant d’archives familiales certaines questions picturales liées à la notion de souvenir. Dans une pratique complémentaire d’écriture Viktoria Oreshko parle souvent des restes du paradigme post-soviétique dans les institutions sociales ukrainiennes de la vie quotidienne.
Les évènements survenus récemment dans son pays ont complétement changé la vision qu’elle avait de sa propre pratique artistique. Elle a ressenti que s’était absolument inutile de peindre. Et elle a attendu cinquante jours après le début de l’invasion russe pour repeindre et travailler sur une toile qui parle du « Brave Stars », l’inscription sur le sweater d’un jeune garçon dont le corps a été retrouvé sous les décombres d’un immeuble à Marioupol. Depuis le début de l’attaque sur Kyiv, Viktoria Oreshko collecte chaque jours un grand nombre d’images et documents divers sur le conflit. Elle a fait un choix conscient de regarder. Regarder l’indicible et l’incompréhensible. Choisir de regarder l’insoutenable et de la transposé sur la toile pour rendre possible un regard non préparé. Face à l’effacement du « normal » qui est devenue la norme, Viktoria Oreshko veut que ses toiles montrent que cela reste une terrible guerre et pas seulement celle d’une vie au quotidien et parler d’une douloureuse double réalité que beaucoup d’Ukrainiens vivent depuis l’étranger.
« Paysages imaginaires » est une série de lithographies dans laquelle Misha Zavalniy reproduit les images de matériels militaires produits en série (dans ce cas, un hérisson anti-char). Sur le fond de cette image, il crée des variations du paysage ukrainien, un paysage imaginaire de destructions. Observant cette guerre à distance car vivant en France, cette perspective donne à Misha Zavalniy, le sentiment d’une réalité divisée, subjective et extérieure. Les paysages sont généralement abstraits et de couleurs pastel, les couleurs de la crème glacée. L’environnement parisien laisse à son tour une empreinte sur la perception de cette guerre, agissant comme un filtre. Un sentiment qu’il ressent par sa bipolarité : d’une part, il se sent obligé, en tant qu’artiste, à prendre une position politique et civique et à parler de la guerre et de l’aide à apporter à son pays au sein d’un environnement pacifique et prospère et d’autre part, il s’agit d’une tentative de comprendre la guerre comme une destruction, comme un cataclysme, qui entraîne en même temps des changements, une transformation de la société elle-même.
Depuis quelques années le travail de Denys Zhdanov évoque le recyclage des informations et des signes, par les métaphores et les paradoxes propagés par la propagande et la pop culture, aussi nommée néo-propagande, une réalité produite à partir de la propagande.
« The Bunker » est une installation vidéo immersive et « interpassive », une métaphore d’un « bunker d’informations », crée à partir de vidéos témoignant de la guerre en Ukraine, filmées et diffusées par les réseaux sociaux (Telegram, TikTok, Instagram, YouTube), de vidéos POV des militaires filmées pendant les batailles en Ukraine, de selfies réalisés dans les bunkers, gameplay et streaming des simulations de la guerre en Ukraine dans les jeux vidéo. Ce média devient le support d’une nouvelle réalité produite par le virtuel, la propagande et la fiction.
TOUT ART CONTRE LA GUERRE est le titre d’une publication éditée en mars 2022 en réaction à l’agression russe en Ukraine.
Elle a été rendue possible par l’engagement visuel et écrit d’une cinquantaine d’artistes, de photographes, d’architectes, de graphistes, d’auteur-ice-s et de critiques qui se sont librement exprimé-e-s sur la guerre en Ukraine:
Julia Andréone, Wire• David • Katia Bokatova Vincent • Florence Balducci • Juliette Bensimon Marchina • Paul de Brancion, Guerre dissemblable • Christophe Brunnquell • Stéphane Calais, Nestor Makhno • Olivia Clavel • Claude Closky, X • Christophe Jacquet dit Toffe, Tournesol8.tif • collage féministe Paris • Anne Colomes • Nicolas Descottes • Marc Desgrandchamps • Fang Dong • Pascal Doury (en hommage) • Pierre Doze, Le miroir • Estudio GarciaBalza & Gonzalez • Clément Faydit • Dominique Fury, Kill my Brother • Anna et Pierre Giner • Aleksa Haluszczak • Hyppolyte Hentgen • Thomas Hirschhorn, I love Malevitch • Frank Houndegla • Manuel Joseph (en hommage) • Nikita Kravtsov • Vincent Labaume • Victoire Le Bars, P. Don’t Text • John Lalor, Moment of Surrender • Atelier Majcz architectes • Ramuntcho Matta • Nicolas Milhé, Vladimir • Jean Luc Moulène, Errata la Guerre II.Tiff • Norm • Kiki Picasso • Viktoria Oreshko • Françoise Petrovitch • 4 Taxis • Pierre lin Renié • Étienne Robial • Alain Séchas • Sylvia Tournerie • Pierre Vanni • Valentina Traïanova, Mig 29 • Rozenn Voyer • Denys Zhadnov • OfficeABC
TOUT ART CONTRE LA GUERRE est une publication diffusée gratuitement et participe aux actions engagées pour financer l’aide humanitaire en Ukraine. L’association culturelle et humanitaire, Ukraine Amitié, basée à Bordeaux, récolte les dons qui servent des interventions sur le terrain.
Tirée à 10.000 exemplaires, TOUT ART CONTRE LA GUERRE a le soutien du Centre national des arts plastiques, du Palais de Tokyo, de la Ville de Bordeaux et de l’École supérieure des beaux-arts de Bordeaux.
À Bordeaux, TOUT ART CONTRE LA GUERRE, a fait l’objet d’une présentation vers le grand public en agrandissant les visuels pour leur affichage dans des panneaux « Decaux » disposés Place Gambetta durant le mois d’avril 2022.
: TOUT ART CONTRE LA GUERRE, la publication et la soirée, sont conçues et coordonnées par Pierre Ponant avec la collaboration de Christophe Jacquet dit Toffe et de Clément Faydit pour la réalisation graphique.