Jeremy Shaw Dans le cadre de la 12ème Biennale de Lyon

La pratique de Jeremy Shaw se compose comme une quête permanente et obsessionnelle des processus de sortie de soi, fusse par la danse, l’hypnose, la drogue ou la musique. Au coeur de ses recherches demeure la figure de l’homme et son désir de transcendance, d’élévation, son aspiration à libérer son âme pour temporairement échapper à l’emprise du corps et du réel, et ainsi atteindre des mondes inaccessibles. Comment une expérience de transe peut-elle être partagée et communiquée ? Le langage est-il un outil suffisant pour rapporter ces voyages dans l’ailleurs, et comment peut-on enregistrer les fluctuations de la pensée en fuite ?

Des peintures rupestres vieilles de plus de 30000 ans de la grotte Chauvet analysées par Jean Clottes et David Lewis-Williams* comme le résultat de pratiques de transe aux récents portraits de Bryan Lewis Saunders sous l’emprise de drogues, les tentatives d’enregistrements des visions générées par les états altérés hantent l’œuvre des hommes depuis des millénaires, alors que la conscience constituerait le moyen d’atteindre les mondes spirituels. Naviguant en permanence entre le rationnel et le mystique, le travail de Jeremy Shaw tente pour sa part de capturer cette matière invisible au moyen de procédés rationnels et méthodiques hérités de la méthode scientifique. Au travers d’observations, étude de cas, examens empiriques et enregistrements frénétiques, l’artiste sonde cette quête de libération de l’être, soulignant l’irréductible mobilité de la matière qu’il tente de révéler.

Pour l’exposition ‘Des présents inachevés’, Jeremy Shaw présente une série extraite de l’ensemble Transcendental Capacities (2008-2013), recherche toujours en cours et initiée il y a plusieurs années. Utilisant la méthode de la photographie Kirlian, Jeremy Shaw électrocute son index lors de l’écoute de musiques sélectionnées selon différents critères, et tente ainsi d’enregistrer les effets de cette écoute sur l’énergie magnétique de son corps, également décrite comme « aura ». L’œuvre DMT (2004) est une vidéo présentant des enregistrements de transes sous substance psychotrope, les différents participants tentant à posteriori de décrire et communiquer cette expérience. Entre hésitations et frustrations, le langage apparaît ici comme un outil inefficace et inadapté, qui révèle l’impossibilité pour ces volontaires de transmettre de manière satisfaisante les sensations éprouvées. Jeremy Shaw est né en 1977 au Canada. Il vit et travaille à Berlin.

Cette œuvre bénéficie du soutien du Centre culturel canadien à Paris.


* Jean Clottes et David Lewis-Williams, Les Chamanes de la préhistoire, Seuil, collection Points Histoire, 2007.