
Cédric Fauq, commissaire en chef au Capc, musée d’art contemporain de Bordeaux et Nora Hickey M’Sichli, directrice du Centre Culturel Irlandais, Paris, s’entretiendront avec Andrée Murphy, directrice adjointe de Relatives for Justice, ONG nationale d’aide aux victimes qui offre un soutien thérapeutique et plaide pour les droits des personnes endeuillées ou blessées par le conflit et Daniel Gerard Morrison, dit Danny Morrison, figure marquante du républicanisme nord irlandais. Activiste engagé, il est souvent associé à la Provisional Irish Republican Army (IRA) et au Sinn Féin, avant de devenir écrivain et journaliste.Pour clore cette rencontre, chansons interprétées par COLE du groupe Fallen Alien, de l’album HANNAH.Traduction simultanée par l’artiste, performer et musicien Macdara Smith.
Dans CIVIL HOPE, on découvrira la lente transformation d’un sniper avec son uniforme de mimésis, le venin des lâches. Ce tireur d’élite qui est un étranger, un outsider, un perturbateur de la paix. Un bonhomme verdâtre qui se révèle être, dans la transparence de ses apparats, un tueur furtif, intrusif par goût, un mécanicien de l’irrationnel, sans limite. Il ne se pense pas. Il neutralise des vies sans en être l’ordonnateur, dans une logique de l’irresponsabilité comme mode virtuel. C’est le fonctionnement sans détour de cette procédure d’entremêlements et de collusions qu’Andrée Murphy dissèque dans le chapitre : WOMEN, THE POLICY OF COLLUSION AND DEAL WITH THE PAST. En 2019, on m’avait mis en garde : “Si tu revêts ce costume à West Belfast, cela ne sera pas sans conséquences ! On pourra te reprocher de légitimer, de minimiser des meurtres.” Je n’ai pas écouté le conseil. Le risque est inhérent pour inventer d’autres modèles. C’est ainsi que l’histoire réelle de ce tome 1 a démarré, par un renversement.
“Ce n’est plus le loup qui court après les moutons, ce sont les moutons qui courront après le loup”. Ce n’est plus uniquement l’affaire de décortiquer l’histoire de la domestication, de classification, ou colonisation, de ses basses motivations, d’êtres s’autoproclamant supérieurs. C’est la rencontre fortuite avec un groupe d’enfants de West Belfast en 2019, à mi-chemin, entre leurs rêves et les manières dont certains les vivront et d’autres renonceront, épuisés par des -isms. Dans leurs enracinements viscéraux, ils engloutissent les anciennes histoires pour initier leurs propres récits mythiques, inventer de nouvelles identités sans pour autant les définir. Nous sommes !!! Juste penser des énergies, des chants nouveaux, des basculements dont on sent bien qu’ils portent en eux, ce que le mot Rébellion signifie : la reprise des hostilités, renverser la table ! OPEN YOUR KINGDOM !
Ce matin-là, l’hostilité était devenue une affaire d’assimilation. Mon costume de sniper, d’herbes et de feuilles partait en lambeau. L’impunité ne sera peut-être plus au rendez-vous. A quelques centaines de mètres de là sur Falls Road, on entendait les clameurs des familles réclamant la fin de l’anonymat. C’est la chaleur de ma mère qui réapparaissait, celle de Danny, celles de tant d’autres, la chaleur du courage. L’amour de Danny et le mien, des sœurs et des frères pour West Belfast ne sera plus que symbiose et sérendipité. L’osmose de Danny Morrison dans THE FREEDOM OF WEST BELFAST détaille avec finesse cette entité humaine faite d’une multitude merveilleuse de potentialités, de vies, de variétés. Une entité vivante qui transforme les coups reçus en autant de réponses impertinentes et libératoires qu’on appelle la Joie, cet acte absolu de résistance. C’est avec les mères, des irlandaises, de celles de West Belfast, de Belfast et de l’île dans toute son intégrité, d’une rébellion ancestrale et clairvoyante que les racines forment l’infini variété des êtres, il n’est pas nécessaire d’avoir peur. Chacune et chacun choisira sa vie, il n’y a rien à redire là-dessus. “…We are a river flowing. We’ re a river flowing…” ( Irish ways and Irish laws, a song by John Gibbs, 1981)
CIVIL HOPE, tome 1 de David Ryan aux Éditions JOCA SERIA
Intervenant·es : Cédric Fauq, Nora Hickey M’Sichli, Andrée Murphy, COLE, Macdara Smith
Cette soirée a reçu le généreux soutien du Centre national des arts plastiques, d’ALRIC TANNERIE, de Documents d’artistes Bretagne, de la Maison Salvan à Labège et de Passerelle, centre d’art de Brest.