CLEON PETERSON

CLEON PETERSON – POWER

Élevé dans des milieux marginaux, Cleon Peterson (né en 1973, vit et travaille à Los Angeles) crée un Eldorado pictural sanglant où désordre et pulsions inavouables se donnent libre cours, libérés de morale et de justice. « Homeless », policiers, bourgeois et « crackmen » anonymes s’affrontent dans des rixes collectives épiques, inégales et armées, dépouillent et violent les passants pour finir en gang-bangs non consentants. Cleon Peterson convoque dans sa peinture à l’esthétique « flat » l’héritage des vases grecs antiques et des oeuvres de Bosch, Bruegel ou Matisse qu’il actualise avec sa connaissance du graphisme, des cultures underground, et de son histoire. Il dépeint ainsi un fantasme graphique épuré poussant au paroxysme la tension qui se joue au quotidien dans les territoires de misère et d’ultra-violence urbaine.

D’abord réputé pour son travail d’illustrateur dans l’industrie “indie” du skateboard, Cleon Peterson – frère du photographe Leigh Ledar – est ensuite passé par l’industrie du design graphique pour se sortir de la rue. Il travaille depuis une dizaine d’années aux cotés de Shepard Fairey (Obey), qui a préfacé son premier ouvrage à paraître fin 2014.  Peintre d’atelier, Cleon Peterson a  récemment transposé sa peinture sur mur dans l’espace public, tout en continuant ses oeuvres sur bois.

Pour sa première exposition en France, l’artiste a peint une fresque de 48 mètres de long où des hommes anonymes nus se livrent à une danse meurtrière, en noir et blanc. Chorégraphie du corps dans l’affrontement, cauchemar, violence physique et mentale: face au mur et sans recul, Cleon Perterson n’offre ni échappatoire, ni jugement moral sur l’état du monde en crise. Il explique :  « Dans ma peinture, j’essaye de lutter contre ce dualisme qui divise le monde entre le bien et le mal, la folie et la raison, la loi et les criminels. Je peins une réalité qui est dehors, que tout le monde n’a pas forcément vécue. Un monde qui est sombre, qui est en chacun de nous.  Mon travail parle de l’ordre, la morale, la domination, des jeux de pouvoirs, de l’oppression, des laissés pour comptes. Je m’inspire de mon expérience passée dans les rues de New York dans les années 1990, lorsque j’étais accro à l’héroïne et livré à moi même. Ma famille m’avait tourné le dos, je suis passé par la prison et les hôpitaux psychiatriques. C’est une expérience intéressante d’être dépendant à la drogue, de se réveiller en étant désespéré chaque jour, d’être fauché. Ca te montre à quel point la morale et les valeurs des gens sont flexibles. Tu n’as plus peur de rien, ni des risques ni du jugement des autres. Il y a une dynamique qui se dégage de ces situations de détresse qui poussent les gens au vol, la violence, les viols, l’autodestruction. Il y a une sorte d’honnêteté dans ces modes de vies miséreuses. S’il n’y a pas de peine, il n’y a pas de bonheur. »