Sa matière première, l’écriture, son leitmotiv, la répétition. Natalie Czech (née en 1976, vit et travaille à Berlin) est une jeune artiste allemande, dont la pratique artistique oscille entre poésie concrète et photographie conceptuelle. Par son caractère reproductible et ses qualités esthétiques, la photographie lui permet de traiter des mots en image et de (dé)composer une image par des mots. Pochettes de disques, ipad, kindle, lettres, magazines, journaux sont autant de vecteurs par lesquels transitent les mots et sur lesquels l’artiste révèle, par marquage, les poèmes de Robert Creeley, Allen Ginsberg ou Gertrude Stein pour ne citer qu’eux.
Pour le Palais de Tokyo, Natalie Czech réactive une œuvre intitulée Il pleut by Guillaume Apollinaire réalisée en 2012 avec la collaboration de quatre écrivains – Vanessa Desclaux, April Elizabeth Lamm, Ashkan Sepahvand et Mara Genschel- et convoque trois auteurs supplémentaires pour l’occasion : Jacques Roubaud, Vincenzo Latronico et Amilcar Packer. Le calligramme d’Apollinaire, servant de point de départ à l’élaboration d’un texte écrit dans la langue maternelle des invités, apparaît à la fois comme un signe, motif imprégné dans l’œuvre, et comme un refrain, motif récurrent de l’œuvre. Plusieurs temporalités et strates de lecture se superposent, intrinsèquement liées à l’intertextualité qui s’opère. Son travail invite à être lu et relu. Il est en cela intemporel mais non dénué de rythme.
Jouant de l’introspection et de l’expressivité, l’artiste s’efforce de contenir son œuvre dans un cadre alors que tout tend à se déployer en dehors de ces limites, comme pour libérer le sens des mots. Ouvertures sur le monde, les fenêtres revêtent l’étrange apparence de palimpsestes, dévoilant de nouvelles perspectives visuelles au spectateur : « Je n’ai rien à dire. Seulement à montrer ».