Sara Kontar, Série towards A Light, 2021-2022, courtesy de l’artiste

Édito : En art et contre tout

Par Guillaume Désanges

L’actualité brûlante et l’intensité du présent ne doivent pas nous tétaniser mais au contraire nous renforcer dans nos missions : donner à entendre des voix alternatives à travers le chaos. Avec les artistes, nous devons continuer de créer, d’inventer, d’explorer sans choisir entre l’intelligence et la beauté, entre le réel et la poésie, entre l’espérance et la lucidité. Nous devons rester amoureuses et amoureux de l’art avec ses contradictions fondamentales, qui relèvent d’une sorte de régime quantique. Soit, être capable d’être dans deux états opposés au même instant : à la fois insuffisant et indispensable, compromis et libre, dérisoire et sublime. Nous devons rester amoureux et amoureuses de cette chose étrange mais vivante, irréconciliée et subversive qui continue de se débattre au cœur tous ces déterminismes, toujours prête à griffer nos imaginaires.

 

 

Bissane Al Charif, série « Pianola », technique mixte sur papier, 28 x 38 cm, 2022-2023, Courtesy de l’artiste

Cette énergie particulière dynamise le Palais de Tokyo à travers un programme en branchement direct avec les idées, les formes et les manières de faire d’aujourd’hui. Une énergie paradoxale, à la fois fulgurante et durable, particulièrement à l’œuvre dans cette nouvelle saison d’expositions et d’événements qui s’étend exceptionnellement jusqu’à l’été. Dans sa diversité, cette mosaïque de projets singuliers dessine quelques motifs qui entrent en résonance avec l’actualité du monde, qu’elle soit sociétale ou géopolitique. Il y est notamment question de fonction sociale et politique de la création, de guerre et d’exil, de santé mentale, d’empathie et de solidarité.

 

 

Mohamed Bourouissa, Sans Titre, 2023-2023, Courtesy Mennour Paris / ADAGP, Paris, 2023

Des motifs et des humeurs abordés par le biais de tensions fécondes. Des utopies qui déchirent des ciels encombrés. Des fatigues qui réveillent et des espaces de repos qui résistent activement. Des désirs malgré la violence. Des pratiques réparatrices dans un monde abîmé. La possibilité d’aller chercher le futur dans le passé et des repères dans certains points aveugles de l’Histoire. Des échos qui ne se répètent jamais et des perspectives dans la nuit.

Autant d’hommages à ce que peut l’art, dans sa capacité à être avec, contre, pendant, à côté, derrière, en dessous, au dessus du réel… et en plein dedans.

Une bonne visite à toutes et tous.