Les Guerrilla girls sont des vengeresses masquées féministes qui s’inscrivent dans la tradition des bienfaiteurs anonymes tels Robin des Bois, Wonder Woman et Batman. Elles utilisent des faits, de l’humour et des images choquantes pour révéler la discrimination et la corruption dans la politique, l’art, le cinéma et la pop culture. Elles minent l’idée d’une narration traditionnelle en révélant ce qui est présupposé, sous-entendu, négligé, et tout bonnement injuste. Elles ont dévoilé en plein Hollywood des affiches dénonçant l’industrie du cinéma à l’occasion de la cérémonie des Oscars, accusé le Museum of Modern Art de New York lors du Feminist Futures Symposium auquel le musée les avait invitées, et créé des projets de grande envergure pour la biennale de Venise, le Centre Pompidou de Paris; mais aussi en Irlande, à Istanbul, Mexico, Athènes, Rotterdam, Bilbao, Sarajevo, Shanghai, Cracovie, et Montréal. Elles ont signé des autocollants, des panneaux, des affiches, des œuvres de rue et des livres dont The Guerrilla Girls’ Bedside Companion to the History of Western Art (Le livre de chevet des Guérilla Girls, une histoire de l’art occidental); Bitches, Bimbos and Ballbreakers : The Guerrilla Girls’ Guide to Female Stereotypes (Les salopes, les bimbos et les briseuses de couilles : un guide des stéréotypes féminins); The Guerilla Girls’ Art Museum Activity Book (Le cahier d’activités des Guérilla Girls pour les musées d’art) ; et The Guerilla Girls’ Hysterical Herstory of Hysteria and How it Was Cured, from Ancient times Until Now (La drôle hystoire de l’hystérie et de ses remèdes, des temps anciens à nos jours) Leur travail circule grâce à celles et ceux qui les soutiennent envers et contre tout. Elles voyagent dans le monde entier pour réaliser des performances et des ateliers, tout en encourageant des milliers de personnes à inventer, à leur tour, un activisme aussi fou que personnel. Au court de ces seules dernières années, en plus d’avoir parcouru les Etats-Unis, elles sont passées par l’Australie, le Brésil, l’Espagne, la Suède, la Finlande, la Suisse, la Pologne, l’Irlande, la France et le Canada.
Les Guérilla girls ont récemment dévoilé leur dernier projet autour des musées d’art, «Time for Gender Reassignment» dans le cadre d’une exposition de travaux contemporains au Columbia College de Chicago «Not Ready to Make Nice : The Guerrilla Girls in the Art World and Beyond» («Pas prêtes à jouer les gentilles : Les Guérilla Girls dans le monde de l’art et au delà»). Elles ont lancé une nouvelle édition de The Guerrilla Girls’ Art Museum Activity Book, une parodie des publications que les musées créent pour apprendre aux enfants à apprécier l’art (seulement le leur enseigne à critiquer les musées). Leurs affiches et panneaux au sujet de la politique et de l’égalité devant le mariage ont envahi les rues de Boston et de Washington avant les élections présidentielles de 2012. Nombre de débats et de performances sont à venir, dont le Feminist Boot Camp (le camp d’entraînement féministe) à New York; l’anniversaire des cent ans du
suffrage féminin à Bergen en Norvège; le Meltdown Festival de Londres, organisé par Yoko Ono; la biennale de Gothembourg; et la Alhondiga de Bilbao en Espagne.
Nous ne sommes pas féministes mais nous pensons que le débat plusieurs fois tenté, en France, sur la représentation des femmes dans les expositions d’art contemporain mérite mieux que deux blagues goguenardes.
Nous ne sommes pas féministes mais nous nous demandons pourquoi un critique malhabile jugeant l’œuvre de David Hammonds trop «africaine-américaine» se verrait rapidement qualifié, non sans justification, de raciste ou d’imbécile alors qu’il pourrait sans crainte désigner l’œuvre d’une femme comme trop féminine.
Nous ne sommes pas féministes mais nous nous demandons pourquoi ce même critique (décidément peu pertinent…) trouvant l’œuvre de General Idea trop homosexuelle se verrait immédiatement affublé – avec raison – du terme d’homophobe, alors qu’il peut, sans subir aucun reproche, juger l’œuvre d’une femme trop girly.
Nous ne sommes pas féministes mais sommes dubitatifs quand des acteurs de l’art contemporain affirment qu’une œuvre d’art pertinente est «nécessairement» asexuée.
Nous ne sommes pas féministes mais nous demandons sérieusement si l’art asexué est autre chose qu’un art trop évidemment masculin comme l’art dit international fut rarement autre chose qu’un art occidental, principalement américain.
Nous ne sommes pas féministes mais nous demandons pourquoi et comment le terme féministe est devenu, en France, presque péjoratif.
Nous ne sommes pas féministes mais nous demandons pourquoi tout le monde n’est pas féministe.
Nous ne sommes pas féministes mais nous avions un fort désir d’inviter les Guerilla Girls, particulièrement ici, à Paris.